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                                      Par Liliane Janvier 2020
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La prison sainte Anne

   A l’origine, c’était la tour de la Campane du Palais des Papes qui servait de prison apostolique (photo de droite).
   A la Révolution elle devint prison départementale, mais ne suffit plus. La ville décida de construire un nouveau bâtiment sur l’emplacement de l’hospice des Insensés, dont s’était jadis occupé la Confrérie des Pénitents noirs. Leur chapelle fut heureusement sauvegardée lors des nombreuses expropriations qui eurent lieu sous la direction de l’architecte Eugène Pascal. Les travaux durèrent de 1864 à 1871. Une chapelle très ancienne, démolie en 1792, portait le nom de sainte Anne près de la cathédrale.
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   La bâtisse s’étend sur une superficie de 8400 m², 140 mètres de long et 60 de large, isolée par le Rocher des Doms qui la surplombe, et par un haut mur datant du XIVème siècle.  Un chemin de ronde fait le tour des bâtiments hauts de deux ou trois étages, encadrant plusieurs cours et comprenant le quartier des hommes au nord et celui des femmes au centre, ainsi que l’administration.   

 

La chapelle fut transformée en cuisine.  Pendant la première Guerre Mondiale, elle servit de prison militaire.  Des prisonniers juifs y furent secrètement enfermés avant d'être déportés en 1943 et 1944.

C’était une prison « de quartier » avec des cellules communes.  Depuis la partie du Jardin des Doms qui surplombe la prison, les proches des prisonniers tentaient de leur faire passer des messages en criant.

La dernière exécution capitale se déroula devant la porte de la prison le 15 février 1936. Michel Nicolini dit le Corse, condamné pour assassinat, entendit dresser les « bois de justice » à cinq heures du matin. On rapporte qu’il assista à une messe et communia, fit écrire une lettre à ses parents (il était illettré), but un verre de rhum, fuma une dernière cigarette et  fut guillotiné à 6h 20.

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Le « mur des offrandes »

 

   Sur le mur d’enceinte de la prison, les parpaings mal scellés qui bouchaient une ancienne porte se creusèrent de trous et, depuis 1987, les niches ainsi crées se remplirent d’objets divers offerts par les passants. 

A l’origine cependant, le mur des offrandes s’appelait « mur des oubliés » en mémoire des détenus qui se seraient suicidés dans la prison. On dit que ce sont les familles des prisonniers qui laissaient là leurs offrandes, en référence aux ex-votos de la chapelle des Pénitents Noirs. Le mur et ses offrandes hétéroclites ont survécu au départ de la prison en 2003 mais malgré les protestations il a été démoli pour faire passer les engins du chantier de l’hôtel qui n’a jamais été construit.

   Ce n’est qu’en 2000 qu’un rapport de la commission d’enquête du Sénat la déclara trop vétuste, et en 2003 les détenus furent transférés à la prison du Pontet plus récente. Les bâtiments furent alors laissés à l’abandon, les cellules contenant encore du mobilier et des effets personnels. On découvrit une quantité considérable d’archives, comprenant celles de la prison de Carpentras, sous les combles.

La prison fut mise en vente en 2007 par l’État. La mairie comptait  en faire un hôtel de luxe malgré les protestations des Avignonnais, mais le projet n’aboutit pas.  Un nouveau plan de réhabilitation est en cours : la mairie actuelle l’a confié à l’architecte Vincent Speller (rénovateur de la rue de la République à Marseille) qui promet 68 logements, une Auberge de Jeunesse, une friche culturelle et des places de stationnement.

LES PORTES DE LA PRISON

 

Visite de la prison Sainte Anne désaffectée

à l’occasion de l’exposition de la fondation Lambert,

« La disparition des Lucioles ».

Septembre 2014

Les prisonniers sont partis (enfermés ailleurs)

les portes sont restées

ouvertes

rouillées pelées lépreuses

du poids de toute la misère qui s’est collée dessus

et ne s’en ira pas

Les murs offrent à votre imagination leurs délires

de peintures craquelées

et de plâtre pourri

Les œilletons sont borgnes

mais les serrures

parfois

parlent

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Les escaliers grillagés ne donnaient que sur la cour.

La cour de la prison.

Dehors il faisait beau, c’est Avignon.

 

Du haut du jardin des Doms, les familles s’époumonaient vers les fils, les frères, les pères, les époux, les mères, les épouses, emprisonnés.

 

Il y avait des violeurs et des meurtriers, mais peut-être aussi des Jean Valjean parmi eux.

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Les malheurs passés dessinent  sur les murs d’étranges cartes de continents déchiquetés,

de jungles interdites et d’océans sismiques.

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Du délabrement comme œuvre d'art
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Et de l'humour pour résister.
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La prison

C'est comme un long sommeil dont on voudrait sortir

Un coma capricieux fait de noir, d'éclaircies

La prison c'est le vide, le néant, l'amnésie

C'est la nuit qui se traîne et ne veut pas finir.

 

Texte anonyme

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